Browsing by Author "Hadad, Samir"
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Item Convergence et divergence lexicales en kabyle(Université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou, 2019) Hadad, SamirL’objet de notre recherche est de lever le voile sur les cas qui passent pour de la variation avérée, mais, également, de recenser les vrais cas de variation. Notre objet d’étude est la langue kabyle, plus exactement : la variation géolinguistique du kabyle et sa convergence sur le planlexical. Le kabyle, à l’instar de toutes les autres langues à forte tradition orale, est une langue qui, en l’absence de toute norme linguistique, connaît une tendance ‘’accentuée’’ à la variation linguistique sur tous les plans. M.-L. Moreau dit : « Aucune langue ne se présente comme un ensemble unique de règles. Toutes connaissent de multiples variétés (ou lectes), dont la diversité est masquée par des étiquettes au singulier (LE français, LE turc, ..). Le caractère commode de ces dénominations ne doit cependant pas masquer leur caractère abstrait et réducteur » (Moreau, 1997, pp.283-284).Les berbérisants regroupent les variétés amazighes en "dialectes régionaux" : le kabyle, le chaoui, le mozabit, le touareg, etc. à l’intérieur desquelles l’intercompréhension est assurée. Ces "dialectes" sont eux-mêmes constitués de parlers correspondant aux différents villages ou/et aux tribus. Chaque parler possède des particularités spécifiques qui ne sont pas seulement restreintes au vocabulaire mais touchent également la phonétique, et la morphosyntaxe. Le kabyle est la langue maternelle et usuelle de l’immense majorité de la population de Kabylie. Il convient à ce propos de souligner que les nombreux découpages administratifs de l’entité géolinguistique kabyle opérés par l’Etat algérien ont eu pour conséquence de fragmenter l’aire de la kabylophonie sur sept wilayat (Tizi-Ouzou, Bejaia, Bouira, Boumerdes, Sétif, Bordj Bou arreridj, Jijel). Tant et si bien que seules Tizi-Ouzou et Bejaia peuvent être considérés comme presque entièrement berbérophones, les autres régions (villages et tribus) de la kabylophonie sont intégrés dans des wilayat dont la plus grande partie de la population est arabophone (Bouira, Boumerdes, Sétif, Bordj Bou arreridj, Jijel). La situation géolinguistique kabyle, réduite par certains à une simple distinction entre variété de "Grande Kabylie" et celle de "Petite Kabylie", est beaucoup plus complexe. Les variétés kabyles constituent un continuum linguistique rendant toute tentative de classification des parlers très difficile. K. Naït-Zerrad (2001, 2004), de son côté, a envisagéquatregroupeslinguistiques plusoumoins homogènes (cf. Carte géolinguistique 01) : - extrême occidental (EOC: Tizi-Ghennif, Boghni, Draael Mizan...) ; occidental (OC: At Menguellat, At Yiraten, At Aïssi, AtYanni...); oriental(OR-Ouest :At Mlikeche, At Abbas, OR-Centre : AtAïdel, At Khiar, OR-Est: At Sliman...); extrême oriental (EOR : Aoqas,Melbou, AtSmail...). Comme il l’a si bien signalé : « Al’intérieurd’ungroupe,ilpeutbienentenduexisterdesdifférences surteloutelpointtrèsparticulierdansteloutelvillage (...)Onnenoteraiciquelestendances lourdes»(Naït-Zerrad2004). Dans notre recherche, il sera question de la variation géolinguistique, c’est-à-dire de la diversité des usages de la langue kabyle à l’échelle de toute la Kabylie. Notre travail consiste en la recherche de la distribution des faits linguistiques dans l’espace géographique. Cependant, il sera aussi question dans notre travail, de la recherche de l’unité lexicale au sein du Kabyle, unité voilée par les évolutions linguistiques, et qui aboutissent, en finale, à la variation linguistique. L’exemple ci-dessous, illustre parfaitement ce propos : Ainsi, comme indiqué sur la carte ci-dessus, bien qu’il s’agisse d’un seul verbe issu de la racine WRG, les altérations formelles qui l’affectent lui confèrent des identités lexicales multiples, alors qu’il est question, tout simplement de la chute de la semi-voyelle w dans argu, et de sa « consonnantisation » dans bargu, dans les autres cas, se sont aussi de simples altérations formelles. Tout au long de notre recherche, nous nous attellerons à déceler ce qui est convergeant et ce qui ne l’est pas dans le lexique kabyle, à travers un lexique commun sur le plan interdialectal, le kabyle y compris. Autrement dit, il s’agira, pour nous, de porter des éléments de réponse à cette problématique : le lexique relevé par Haddadou comme étant commun entre les différents dialectes berbères, est-il commun ou divergeant sur l’échelle intradialectale kabyle ? il s’agira, également de tenter des interprétations, quand cela est possible, de la variation linguistique en kabyle, notamment en ce qui concerne le volett sémantique. Ainsi, à la fin de cette recherche, nous établirons un lexique commun et un autre divergeant, dont les praticiens de la langue devraient tenir compte. Nous pensons dès l’entame de notre recherche, que la variation est tributaire de la nature des régions à l’étude. En d’autres termes, nous posons en hypothèse que l’aspect géographique influe sur l’évolution de la langue, et, du même coup, il peut être un marqueur de différenciation linguistique. Dans les régions montagnardes, par exemples, nous trouverons le vocabulaire marin pauvre par rapport à ce qu’il peut l’être dans les régions maritimes. Dans les plaines également nous avons à faire à un vocabulaire agricole riche par rapport aux montagnes. En outre, il ne faut pas perdre de vue l’aspect sociolinguistique des régions : dans les villes l’emprunt est plus important par rapport aux régions plus ou moins reculées. Etant enseignant au sein du département de langue et culture amazighe de tizi-ouzou, nous assurons les modules de lexicologie et sémantique depuis au moins 15 ans. Au début, nous dispensions un enseignement bilingue français-kabyle. Mais dès que nous nous sommes résolus de procéder à la berbérisation des enseignements, nous avons remarqué, de façons plus frappante, comparativement au début, la variation chez les étudiants. Nous sentons le besoin des fois de s’arroger un lexique spécial pour chaque étudiant en fonction de sa région ; et c’est l’effusion des « chez nous » on dit comme ça, « chez nous », ça veut dire cela. Les cas les plus frappants, sont ceux où un mot est tabou, voir complétement obscène dans une région alors qu’ailleurs il a un sens « normal ». Nous songeons à ammas qui signifie « bassin » en kabyle et dans le reste du domaine berbère, tandis qu’il signifie « cul » à….. Il en est de même du mot arcal qui signifie « déflorer » à Ain El Hammam, alors qu’il veut dire « mariage » dans la région de Sidi Ali Bounab, amercal étant démesuré en parlant d’un tamis ou d’un vêtement. Ce sont donc, toutes ces raisons qui nous ont amenés à choisir ce thème, ce à quoi il faut ajouter l’ambition de constituer une pierre dans le projet de l’élaboration d’un Atlas linguistique kabyle, en menant notre propre enquête linguistique à travers 23 régions kabyles. Notre ambition dans cette recherche consiste à recenser un fond lexical commun entre les parlers kabyle, mais aussi, si l’unité recherchée n’est pas assurée, relever la variation lexical qui affecte ces mêmes parlers (sur les points d’enquête, voir infra, p :xx). Dès l’entame de notre travail, nous nous sommes confrontés à l’épineuse question de la délimitation d’un corpus qui est plus à même de répondre à notre problématique : quel corpus soumettre mettre à l’étude ? A cette question s’ajoute celle qui consiste à choisir entre recueillir un corpus réduit dans toute la Kabylie ou, à l’inverse prétendre à recueillir « tout » le lexique dans quelques régions de Kabylie. A ce propos, deux options s’offraient à nous : la première, la plus pratique dirons-nous même consiste à procéder à la confrontation de champs lexicaux. C’est cette méthode qui a permis à Haddadou de dégager un fond lexical commun aux différents dialectes berbères. La seconde, quant à elle, consiste à « cibler les éléments susceptibles de varier à travers le domaine kabyle » (S.Guerrab, op. cit., p ; 212). Finalement, nous avons tranché pour la première méthode. Et, d’ailleurs, notre corpus n’est autre que celui dégagé par Haddadou comme étant commun entre les dialectes berbères. En effet, quoi de mieux que de soumettre un corpus, reconnu comme commun à un niveau inter dialectal, à une comparaison à un niveau intra dialectal, celui du domaine kabyle en l’occurrence ? Le corpus de notre étude est constitué de deux partie : la première comprenant des questions de contenu, des questions en nombre de 05 et qui localisent l’informateur : son village, sa commune, sa daïra ainsi que sa wilaya, et enfin son âge. La deuxième est une liste de 200 termes, rédigé en français, que l’informateur est appelé à compléter avec “son“ kabyle, avec une transcription usuelle et une autre phonétique. Comme annoncé ci-dessus, le corpus que nous recueillions concerne uniquement le lexique, lequel lexique est reparti en champs comprenant : les couleurs ;le corps humain ; des actions Notre corpus, rappelons-nous, est rédigé en langue française et il est spécifiquement destiné à des informateurs kabylo phones, dont la majorité est unilingues analphabètes. Sur les 23 versions recueillies nous avons nous-mêmes rempli le questionnaire dans 14 cas. Comme recommandé par Boukous (opcit : x) nous avons procéder notre questionnaire d’un pré-test que nous avons distribué à un échantillon représentatif (12 informateurs) qui représente un peu plus de la moitié du nombre total des informateurs. Le dit pré-test nous a montré qui n’est pas meilleur panière que d’assister soi-même au déroulement de l’enquête et de procéder ainsi au remplissage du questionnaire. Cependant, nous avons été relayés par un enquêteur à qui nous avons confié la collecte de 03 versions1. Il s’agit de Zenia Aziz, licencie en langue et culture amazigh, natif des At Jennad, 1 il s’agit des localités d’At Jennad, village x, Tigzirt et L.N.I Cf : les nom+intitulés des mémoires que nous avons bien initie aux technique d’enquête que nous jugeons adéquates, comme par exemple, se garder de prononcer le mot rechercher en kabyle ou plutôt dans son kabyle sous peine d’influencer son informateur. Les 05 cas restant sont rempli par des étudiants que nous avons encadrés dans leur mémoire de licences et ils concernent les localités de Kendira, At Mlikeche, Kherrata, Tizi Ghennif, Iferhounene(e), et At Yaala( bouira ). Pour bien remplir le questionnaire chez les informateurs analphabètes, nous avons donc eu accours : A la description, quand il s’agit d’un objet. A la gestuelle, quand il s’agit d’une action. A l’illustration, quand le mot cible est un animale ou une plante. A la périphrase, même en kabyle, mais tout en évitant de prononcer le mot cible. Par contre, la tâche était plus facile auprès de nos informateurs lettrés, mais qui n’ont perdu aucun iota du verbe kabyle. Signalons, enfin de compte, que nous avons, à chaque fois que cela était nécessaire, procéder à la vérification auprès d’autres informateurs des mêmes localités. Après dépouillement du corpus, et après analyse nous avons dégagé les types de variation suivants : Sur le plan phonétique, bien qu’il s’agit d’un phénomène non pertinent et n’ayant aucune incidence sémantique sur les lexèmes, nous présentons dans ce chapitre la variation phonétique observée lors de dépouillement du corpus recueille. Il s’agit, en fait de certaines altérations d’ordre phonétique relevées d’un point, ou plutôt d’un ensemble de points d’enquêtes à un autre. Le relever de ces variation nous a, effectivement, amené à dégager des blocs plus ou moins hétérogènes comparés les un aux autres, mais aussi des groupes homogènes, qui se sont constitués à l’intérieur de ces même blocs. 1. [ð] [ŧ] L’apico-dentale fricative [ð] est réalisée, non d’une manière systématique, il faut l’avouer, [ŧ]. C’est un phénomène non systématique pour l’ensemble du lexique, [aðal] est réalisé tel quel partout aù le terme est attesté y compris dans les régions qui se renomment par la réalisation de [ŧ] à la place de [ð]. Exemple :[ aðər] [aŧər] / [ŧŧər] : 13, 14, 15, 16, 18. 2. [đ] [ŧ] Même le corolaireemphatique du phonème précédent obéit à la même règle.C’est ce qui se révèle dans les exemples suivants : [đəggər] [ŧəjjər] : 8, 9 Sur le plan lexical, il ya une forte tendance à la variation Deux lexèmes rendent cette notion ; il s’agit de idir qui occupe la part du lion avec 11 occurrences (11/22), ce quiéquivaut à 50%, sans compter sa variante dder, deux occurrences, avec qui il atteint 59%et de ɛic//ɛac, emprunt arabe, qui occupe presque 41%. Ainsi donc, deux lexèmes occupent notre terrain d’enquête. Ce qui attire notre attention c’est la coexistence de ces deux lexèmes dans un même point d’enquête, à Tamda, Laalam, Adjioune, Timezrit, Nassiria, iwaqquren et At Yeɛla. Surle plan interdialectal, il est à rappeler que c’est le verbe edderqui fait l’unanimité. Le lexème est tellement vivace qu’il constitue une forte base de dérivation : Tameddurt « fait de vivre, vie, nourriture nécessaire à la vie, nourriture quotidienne » tamudert, asadar « nourriture, vivres » (To) ; tudert « vie » (MC); « durée de la vie » (R) ; « nourriture » (Zng) Toutefois, malgré la forte tendance à la variation, nous avons décelé une sorte de socle lexical commun, notamment en ce qui concerne le vocabulaire immédiat, comme le vocabulaire relatif au corps humain, à la nourriture, etc.